Publié le 08 mars 2022 dans Ressources humaines
Source : monasbl.be
Aujourd'hui c'est la journée des droits des femmes ! Opter pour une approche du genre dans la gestion des ressources humaines de l'ASBL c'est garantir l'égalité entre les hommes et les femmes. Avec l'aide de Marcela de la Peña Valdivia, experte en genre, revenons sur la définition de cette notion et sur ce que les ASBL ont à gagner en l'intégrant dans leur gestion.
La thématique de l'égalité hommes-femmes est parvenue à s'imposer dans le débat public, notamment grà¢ce à l'action des mouvements féministes. Pour autant, la question du genre a-t-elle trouvé sa place au sein de la gestion des ASBL ? Pas tout à fait, constate Marcela de la Peña Valdivia, experte et formatrice internationale en genre, directrice de Chaska international ASBL. « Il y a eu une évolution car on en parle plus mais tout le monde ne comprend pas l'intérêt ».
Dans un premier temps, il est important de différencier les notions de « sexe » et de « genre » :
Ainsi, intégrer le genre à la gestion des ressources humaines c'est mettre en place des pratiques qui tiennent compte de ces différents rôles, comportements, etc.
Si la question du genre revient indéniablement à mettre en lumière les discriminations à l'égard des femmes, il ne s'agit pas de faire « l'amalgame entre femmes et genre. Il y a aussi tout un travail sur la construction de la masculinité et son impact sur les hommes », précise Marcela de la Peña Valdivia.
Comme nous l'avons souligné au début de l'article, aujourd'hui encore, certaines ASBL ne voient pas l'intérêt d'intégrer la notion de genre dans la gestion des ressources humaines. Pourtant, elles ont tout à y gagner.
Au sein des ASBL et ONG que Marcela de la Peña Valdivia a accompagnées, l'intégration de la notion de genre a permis de soulever de nouvelles questions internes à l'organisation du personnel. « C'est une espèce de catalyseur », explique-t-elle.
Les aménagements mis en place ne le sont pas seulement pour les femmes, tout le monde en bénéficie. En effet, l'intégration de la notion du genre permet de construire un espace de travail qui soit plus adapté et moins formaté.
Une meilleure répartition des pouvoirs entre les hommes et les femmes permet également d'ouvrir le champ de vision de l'ABSL et de mettre en avant des compétences jusque-là non reconnues ou invisibilisées dans un contexte de domination masculine. « Ces nouvelles compétences vont entrainer la créativité et l'épanouissement dans la pratiques », continue l'experte.
Un constat notamment réalisé par l'Organisation internationale du travail dans son enquête auprès d'entreprises de 70 pays.
Avoir une politique de genre au sein de l'ASBL peut être un argument de poids aux yeux de certains bailleurs de fonds. Pour les financements publics, c'est parfois même une condition sine qua non.
En effet, la loi du 12 janvier 2007 prévoit que chaque ministre : « veille, dans la cadre des procédures de passation des marchés publics et d'octroi de subsides, à la prise en compte de l'égalité des femmes et des hommes et à l'intégration de la dimension de genre » (Institut fédéral pour l'égalité des hommes et des femmes).
Si l'ASBL souhaite défendre des valeurs d'égalité, encore faut-il qu'elles les respectent en interne. Et la mise en place d'une gestion des ressources humaines genrée est un outil incontournable.
Travailler la question du genre ce n'est pas augmenter la charge du travail, au contraire. Une équipe épanouie sera certainement plus motivée et plus productive. « Il y a des organisations qui ont gagné plus en intégrant le genre, insiste Marcela de la Peña Valdivia. Il faut aller voir ce qui se passe ailleurs pour s'inspirer ».
Maintenant que l'intérêt d'intégrer la notion de genre dans l'ASBL ne fait plus de doute, comment s'y prendre concrètement ? Pour pouvoir mener une politique de genre efficace, il faut prendre en compte trois aspects fondamentaux, insiste l'experte :
Intégrer la notion de genre dans son ASBL revient à s'écarter de la perspective marchande de recherche de rentabilité, qui se fait parfois au détriment des travailleurs et travailleuses.
Comme le souligne Marcela de la Peña Valdivia, de manière générale il y a peu de mobilité au sein des ASBL. C'est-à -dire des perspectives d'évolution limitées. Ainsi, les femmes étant principalement à des postes intermédiaires ont davantage de risque d'y rester toute leur vie.
La vision intersectionnelle permet de s'assurer que l'ASBL offre des opportunités aux femmes, aux femmes discriminées et à toutes les personnes discriminées (du fait de leur couleur de peau, leur handicap, leur orientation sexuelle, leur religion…). Offrir des opportunités ne doit toutefois pas se limiter à engager des femmes discriminées à des postes tels que l'accueil ou encore l'entretien.
Selon Marcela de la Peña Valdivia, il ne s'agit pas seulement d'avoir plus de femmes ou de mettre n'importe quelle femme au pouvoir mais il faut qu'il y ait un autre type de leadership. « Sinon le sexe change mais le contenu ne change pas ». Réciproquement, il ne s'agit pas « non plus de demander plus aux femmes » parce qu'elles sont au pouvoir.
Pour intégrer la notion de genre de la manière la plus adaptée à l'ASBL, il faudra avant toute chose analyser le mode de fonctionnement en interne.
La Fédération Wallonie-Bruxelles a notamment créé en 2014 un document permettant de réaliser un autodiagnostic de l'ASBL. Sinon, il est également possible de se faire accompagner par une personne spécialisée dans le domaine.
Marcela de la Peña Valdivia présente également quelques actions concrètes qui peuvent être menées. Cette liste est bien évidemment non exhaustive.